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samedi 7 novembre 2009

L'Amérique de David Lynch

David Lynch est un génie !
Jusqu’ici je ne vous apprends rien.
Et non, je ne dis pas ça parce qu’il fait des films incompréhensibles et que -comme beaucoup de monde- je trouve comme excuse le génie de l'autre à ma peur de me penser imbécile face à cette incompréhension.

En fait ses films les plus « bizarres » sont en général ceux qui m’intéressent le moins : Mulholland Drive m’a un peu saoulé et je ne suis même pas allé voir Inland Empire au cinéma. Pire, je possède le DVD depuis environ un an, je ne l’ai pas encore regardé.

Franchement, j'ose penser que quiconque sachant se servir d'une caméra peut faire des films surréalistes ou oniriques s’il le souhaite. On a tous un inconscient, on fait tous des rêves.
Là où je pense qu’il est un génie, c’est quand il s’attaque à une autre bizarrerie : celle de la vie quotidienne. Il est un génie quand il ne nous parle ni de fantastique, ni de surréalisme, mais bien d’étrange, dans le sens todorovien du terme bien entendu : cette zone d’ombre, cet entre deux mondes, ce moment où la réalité est prête à lâcher et laisser place à autre chose (au fantastique ? à l’absurde ?) mais pourtant elle tient bon… à peine…



C’est pour cette raison que je trouve que ses films les plus aboutis sont ses films les plus « réalistes » qu’il s’agisse d’Elephant Man ou de The Straight Story. C’est pour cette raison que Twin Peaks est l’une des meilleures séries de l’histoire : pas parce que c’est [censuré] qui a tué Laura Palmer, ni parce qu’il y a un nain dans une pièce rouge, mais bien parce que Dale Cooper parle à Diane et qu’il pense qu’il n’y a rien de tel qu’un bon mug de café le matin, parce que Dennis Bryson aime porter des jupes et des perruques, parce que Lucy Moran a une voix unique, parce que Harry S. Truman s’appelle Harry S. Truman, parce que Nadine Hurley est borgne et qu’elle essaie d’inventer une tringle à rideaux silencieuse.

Twin Peaks est une excellente série grâce à son intrigue, sa mise en scène, ses acteurs. Mais si elle sort du commun, ce n’est pas grâce à ces choses-là, ni grâce à sa dimension fantastique, mais bel et bien grâce à tous ces détails, grâce à cette réalité qui donne vie à tous ses personnages et à cet univers. Une réalité bizarre, certes, mais une réalité.

Et c’est dans cette lignée qu’il héberge sur son site The Interview Project, cette série de mini-documentaires réalisée par Austin Lynch (son fils) et Jason S.
Ces films sont appelés interviews, je les appelle documentaires car chacun d’eux nous fait entrevoir, non seulement toute une vie, mais aussi un monde, un univers si proche et pourtant si éloigné. Je ne parle pas ici de géographie. Quand je vivais aux Etats-Unis, j’ai certes croisé ces gens, mais même en France, en Belgique, ou ailleurs, ils sont là, au coin d’une rue, au bord de la route, dans nos familles même. Et il suffit qu’on prenne le temps de les écouter pour que cet univers s’ouvre à nous, pour que ces histoires, bien plus intéressantes que la plupart de ce qui se fait à Hollywood, prennent vie devant nos yeux.

Les génies ne sont pas uniquement les grands inventeurs. Il y a aussi les grands découvreurs et les observateurs, ceux dont le plus grand talent est de regarder et d’écouter là où il faut et là où personne d’autre ne l’a fait.





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